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08 juin 2021 - Agriculture, Veille économique & Prospective

Des consommateurs en quête de sens

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L’évolution de la consommation en produits alimentaires structure, au moins partiellement, celle des marchés agricoles. En termes d’alimentation, les Français infléchissent leurs achats vers des produits plus responsables, les enjeux planétaires inondant les consciences. Ajoutons que nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à admettre une plus « juste rémunération » du producteur. A ceci près qu’il peut çà et là demeurer un écart entre l’intention et l’acte effectif d’achat.

Par ailleurs, il est sans doute réducteur de limiter le champ de ces évolutions à une batterie de contraintes, là même où les filières peuvent innover et s’ouvrir de nouvelles perspectives.

Pour autant, versant producteur, l’ère qui se dessine peut s’avérer anxiogène. Le temps où l’agriculteur produisait au gré de ses compétences comme de ses goûts appartient au monde d’avant. Toute filière se trouvant désormais en prise avec un empilement de recommandations de plus en plus pointues qui rejaillissent au niveau de la production. Un éventail de cahiers des charges et autres labels fleurit au fil des ans, mettant parfois le consommateur dans l’embarras au stade de son acte d’achat.

Des filières agroalimentaires focalisées sur trois grands domaines stratégiques

Découlant des enjeux sociétaux, l’approche stratégique des filières agroalimentaires se trouve désormais en prise avec trois grands domaines structurants :

  • la préservation des ressources, de l’environnement, au service de la planète,
  • la juste rémunération de l’ensemble des acteurs de la filière,
  • le bien-être animal.

S’ajoute une volonté de relocalisation de l’alimentation. Et, dès lors que l’éloignement du lieu de production s’impose, ce dernier ne doit plus contrecarrer ces grands principes.

Illustration : l’évolution à marche forcée de la filière porcine

  • Production : extension de l’aire de vie des truies, renoncement croissant à la castration, suppression des antibiotiques au-delà de la période de sevrage, alimentation non-OGM, etc.
  • Transformation : abandon progressif des sels nitrités conduisant à la couleur grisâtre des jambons d’antan. Avec pour corollaire, un effort de pédagogie des industriels pour convaincre le consommateur d’une haute qualité avérée.

Le transformateur en première ligne

Pivot de la filière, le transformateur se trouve au carrefour entre d’une part, la distribution, relayant l’évolution des actes d’achat, d’autre part, la production.

Une tendance se dessine dans le monde coopératif désireux d’investir l’aval pour se tenir en prise directe avec la demande et opérer en « circuit court » vis-à-vis des nouvelles tendances de consommation.

Les exemples ne manquent pas, tant dans le monde végétal qu’animal…

Illustration : Savéol – Coopérative bretonne pionnière en fruits & légumes sous serre

  • Ayant investi dans une « Ferme d’insectes » pour palier le recours aux produits phytosanitaires, la coopérative commercialise une gamme de fruits & légumes « cultivés sans pesticides », épousant ainsi la demande du consommateur. En amont, s’organise la conversion systématique des maraîchers à la « Haute Valeur Environnementale » – HVE.

Des consommateurs aux choix de plus en plus responsables…

Lors de son lancement, la démarche « C’est qui le patron ? » prêtait à sourire… Or, la sensibilisation d’un panel croissant de consommateurs de produits laitiers à un prix assurant la « juste rémunération » du producteur, est plus que pérennisée.

Autrement dit, signe des temps, une part croissante de consommateurs trouve du sens dans le fait de situer un producteur moins « banalisé », inscrit dans un milieu, un territoire, porteur de compétences, acteur d’un beau métier. A noter que ce produit mieux valorisé n’est pas forcément porteur d’un atout nutritif additionnel…

Autre signe des temps, à l’heure où la planète est en grande souffrance, où tout gaspillage évité devient résolument vertueux, l’homme à l’initiative de « C’est qui le patron ? » a lancé le concept des « gueules cassées ». En clair, comment rendre le consommateur responsable et acquéreur de fruits & légumes aux formes bizarroïdes. L’enjeu est de taille : 20% à 30% de la production environ ne pouvant être écoulés en circuit classique… et le pari est en passe d’être gagné.

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Le bien-être animal : miroir déformant ou simple grand angle ?

S’il est un registre en mouvement permanent, c’est celui du bien-être animal. Pas une semaine ne passe sans que les médias ne se fassent l’écho d’une alerte ciblant un abattoir, un élevage, voire une filière plus globalement…

Outre l’avènement des repas végétariens dans la restauration publique scolaire, les messages régulièrement assénés sur la prétendue « nocivité » de la viande pour la santé des Français, la cause animale restera durablement au centre des débats.

Le chantier est ardu, et l’urgence imprime un calendrier où la distribution a déjà embrayé une communication dans un sens considéré comme vertueux (surface extérieure de parcours, durée de pâturage, etc.) et demain, respect de conditions d’écornage plus respectueuses, entre autres.

Gage de crédibilité et d’une plus grande objectivité aux yeux du consommateur, les filières se sont accordé le concours des ONG constructives telles que CIWF (Compassion In Word Farming) ou OABA (Œuvre d’Assistance aux Bêtes d’Abattoir).

A noter que les compétences des salariés de ces organisations sont parfaitement rôdées aux conduites d’élevage des animaux de rente. En effet, ces intervenants affichent les mêmes cursus de formation que ceux qui prévalent au sein des instances de développement technique.

Des opportunités à la mesure des nouveaux enjeux sociétaux

Quelques termes simples suffisent à situer les enjeux sociétaux qui vont peser durablement sur les choix stratégiques des filières, et, par voie de conséquence, sur les conditions de production des agriculteurs : santé du consommateur – durabilité – bien-être animal – identification/localisation.

Sans esquiver les contraintes inhérentes au développement des cahiers des charges tout azimut, alimentation & production agricole demeurent incontournables et vouées à un bel avenir. La période Covid, dont nous ne sommes toujours pas sortis, démontre s’il le faut que l’agriculture reste un secteur remarquablement préservé, sans occulter il est vrai la nécessaire agilité des filières pour infléchir certaines gammes de produits au profit d’autres segments plus porteurs.

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Parallèlement, l’avènement de la technologie, du numérique et de la robotisation sera de plus en plus vecteur de performance et de réduction des astreintes. Pour preuve, deux applications récentes promises à un bel avenir. Côté production, des starts-up ont mis au point des robots désherbeurs d’une grande fiabilité pour les cultures maraichères. Côté mise en marché, des producteurs en vente directe peuvent amortir sur une durée relativement courte des casiers automatiques où ils entreposent leurs fruits & légumes, évitant la sujétion d’une permanence en l’attente du passage éventuel des clients.

Demain plus qu’hier, tout produit alimentaire même basique devra intégrer, aux yeux du consommateur, une valeur adossée à celle du « minerai ». Il s’agit de la valeur stratégique du produit.

Citons notamment l’offre touristique pensée par des producteurs en circuit court, lesquels vendent bien plus qu’un fromage ou un panier de légumes, en accordant une visite guidée de leur atelier à des familles désireuses d’un retour aux sources qui fait sens.

Autrement dit, un avenir prometteur s’offre à l’agriculture et à l’ensemble d’une profession où la valorisation globale visera, non seulement un produit qualitatif, savoureux, mais aussi une « coque » faite de services embarqués, mixant tourisme local, retour aux sources, lien historique…

Gage de réussite, le positionnement clair au sein d’une filière, d’un réseau, la détention d’un contrat deviennent déterminants.

L’heure est au sur-mesure, à l’adaptation permanente, à la politique des petits pas

Plus marginale, bien qu’édifiante, cette offre de formation qui fait s’immerger des chefs d’entreprise artisanales ou commerciales, une semaine durant au cœur d’exploitations agricoles. Des stagiaires qui sont demandeurs pour investir du temps et des euros, tout en participant à l’activité agricole du moment. N’est-ce pas là un magnifique retour de sens pour tout un secteur d’activité ?

Une chose est sûre, en matière d’agriculture et de production alimentaire, les lendemains sont prometteurs. En effet, La consommation alimentaire mondiale pourrait croître de 80% d’ici 21001. Hypothèse réaliste à l’appui : 10,9 milliards d’humains en 2100, contre 7,7 milliards aujourd’hui.

Source : Prismes – Crédit Agricole SA – Avril 2021.

1 Travaux de l’Université de Göttingen (Allemagne).

Notre rédacteur Cerfrance Poitou-Charentes :

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Michel DEBERNARD, Pilote de la Veille économique & Prospective
mdebernard@pch.cerfrance.fr